La CJIP Société d’Isolation et de Peinture OMNIUM & Groupe OMNIUM pour faits de corruption dans le sud de la France

La CJIP SAS SOCIETE D'ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM & SAS GROUPE OMNIUM DEVELOPPEMENT POUR FAITE DE CORRUPTION
Un éclairage limpide et instructif sur les faits de corruption avérés et les sanctions prononcées

Nous vous proposons d’accéder ici au texte intégral de la CJIP (Convention Judiciaire d’Intérêt Public) signée le 29 novembre 2023 entre le Procureur de la République près le tribunal judiciaire de Marseille et les sociétés SAS SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM et SAS GROUPE OMNIUM DEVELOPPEMENT. Ce qui est intéressant et instructif ici, au-delà des mécanismes et faits de corruption élémentaires tout autant qu’inacceptables qui sont décrits, ce sont en particulier les décisions prises par le procureur à l’égard des fautifs et leur justification.

D’une part, les règles sont énoncées clairement, qui permettent le calcul détaillé de l’ensemble des montants à payer, jusqu’à l’indemnisation des victimes ; de l’autre est présenté le dispositif de mise en conformité auquel les entreprises concernées devront se soumettre sous le contrôle de l’AFA. ainsi que les modalités de son financement par les mêmes bénéficiaires. Une lecture qui permet d’appréhender au plus juste les ressorts du dispositif de CJIP.

Convention judiciaire d’intérêt public

Entre

Le procureur de la République près le Tribunal judiciaire de Marseille

Et

La SAS SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM

&

La SAS GROUPE OMNIUM DEVELOPPEMENT

Représentée par sa présidente, la SARL COPP’INVEST

Assistées de Me François MAZON

Avocat au Barreau de Marseille

Vu l’article 41-1-2, 180-2 ainsi que R. 15-33-60-1 et suivants du code de procédure pénale ;

Vu l’information judiciaire suivie au sein de la Juridiction Inter-Régionale Spécialisée de Marseille sous la référence 521/05 (N° Parquet : 21 091 000146),

Vu l’ordonnance de transmission de la procédure aux fins de mise en œuvre de la procédure de convention judiciaire d’intérêt public rendue par Monsieur le Vice-président chargé de l’instruction le 30 août 2023

I. LA SAS SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM ET LA SAS GROUPE OMNIUM DEVELOPPEMENT

La SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM est une société par actions simplifiée au capital de 400.000 Euros immatriculée depuis le 7 juin 1984 au Registre du Commerce et des Sociétés de Marseille sous le numéro 329 934 889 qui exerce sous le nom commercial OMNIUM FACADES. Son siège social est situé 117 traverse de la Montre ZAC de la Valentine 13011 Marseille. La société exerce principalement son activité dans le domaine de la peinture générale du bâtiment, de l’isolation, de la restauration de façades d’immeubles, du revêtement et de l’étanchéité.

Elle est détenue par la société GROUPE OMNIUM DEVELOPPEMENT (groupe OMNIUM), qui est elle-même une société par actions simplifiée au capital de 2.545.886 Euros immatriculée depuis le 8 décembre 2020 au Registre du Commerce et des Sociétés de Marseille sous le numéro 891 845 158. Son siège social est situé à la même adresse que celui de la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM. La société GROUPE OMNIUM DEVELOPPEMENT exerce une activité de holding et d’animation de ses six filiales selon la présentation suivante :

Le président de la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM est le GROUPE OMNIUM DEVELOPPEMENT. Le président de la société GROUPE OMNIUM DEVELOPPEMENT est la SARL COPP’INVEST.

En janvier 2023, le groupe OMNIUM employait 159 collaborateurs dont 63 au sein de la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM. Il n’intervient que sur le territoire français, principalement autour de l’arc méditerranéen.

II. EXPOSE DES FAITS

Dans le cadre d’une information judiciaire distincte suivie au sein de la Juridiction Inter- Régionale Spécialisée de Marseille et relative à un trafic international de produits stupéfiants, il était découvert des flux financiers entre l’un des individus mis en cause, par ailleurs entrepreneur dans le bâtiment, et un autre individu présenté comme apporteur d’affaires. Les investigations alors réalisées permettaient d’apprendre que ce second individu était en réalité employé par la Société d’Economie Mixte Immobilière de la Ville de Martigues (SEMIVIM) comme agent polyvalent depuis l’année 2008 et était en outre le compagnon de la directrice du patrimoine de la SEMIVIM.

Une enquête préliminaire incidente était ouverte concernant ces faits nouveaux. Les investigations menées dans ce cadre procédural puis dans celui de l’information judiciaire ouverte dans sa continuité permettaient non seulement de confirmer que l’individu employé par la SEMIVIM avait été rémunéré par l’entrepreneur identifié pour présenter sa société à des sociétés ayant obtenu des chantiers de la SEMIVIM, mais également d’établir qu’il avait mis en place au profit d’autres sociétés un système de corruption dans l’octroi des marchés publics de la SEMIVIM, système dont des sociétés du groupe OMNIUM avaient pu bénéficier.

Le directeur général délégué du groupe OMNIUM indiquait ainsi aux enquêteurs puis au magistrat instructeur que l’individu employé par la SEMIVIM lui avait proposé d’obtenir des marchés publics contre rémunération. Il expliquait spontanément que ce dernier lui avait expliqué que sa compagne était la directrice de la SEMIVIM, et qu’il lui avait proposé, moyennant le versement de sommes d’argent conséquentes, l’obtention de marchés publics de travaux, notamment concernant deux résidences précises gérées par la SEMIVIM, PARADIS SAINT ROCH et LES QUATRE VENTS. Il indiquait qu’il avait alors fait enregistrer de fausses factures de sous-traitance, qui lui étaient remises par l’agent corrompu à l’occasion de ces rencontres, et qui ne correspondaient à aucune prestation réelle. Il expliquait que c’était l’agent de la SEMIVIM qui lui remettait les fausses factures destinées à réaliser ces virements, que c’était donc lui qui choisissait la société sous-traitante fictive, et que lui-même choisissait la société de son groupe en capacité financière pour verser les fonds souhaités. Il confirmait que la contrepartie de ces versements était l’octroi de marchés publics de la SEMIVIM, et précisait que son groupe avait en effet été rendu attributaire de celui concernant PARADIS SAINT ROCH, ce qui n’avait finalement pas été le cas pour LES QUATRE VENTS. Il précisait avoir agi en totale autonomie et qu’il ne s’agissait donc pas d’une pratique habituelle du groupe OMNIUM ni d’une politique commerciale, ajoutant que les autres dirigeants du groupe n’étaient pas informés de son accord avec l’agent de la SEMIVIM.

Les investigations réalisées par les enquêteurs permettaient d’établir que le groupe OMNIUM avait versé une somme totale de près de 550.000 Euros, dont 350.000 Euros provenait des comptes de la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM. A ces virements s’ajoutaient le paiement de deux voyages, pour un montant total de 8.987,52 Euros réglé par une autre société du groupe, dont avaient bénéficié l’agent de la SEMIVIM et sa compagne, ainsi que le don de matériel et de peinture ou encore la remise de chèques cadeaux.

La somme totale perçue par le groupe OMNIUM en exécution des marchés octroyés par la SEMIVIM, principalement les lots 1 et 3 du marché de réhabilitation de la résidence PARADIS SAINT ROCH, était de près de 5,5 millions d’Euros, dont plus de 3,6 millions d’Euros au profit de la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM.

La SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM était mise en examen le 24 mai 2022 des chefs de corruption active d’une personne chargée d’une mission de service public, trafic d’influence actif sur une personne chargée d’une mission de service public, recel de favoritisme et recel de prise illégale d’intérêts.

La SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM déclare reconnaître ces faits.

Le Ministère public considère que les faits tels qu’exposés ci-dessus sont susceptibles de caractériser les délits de corruption active d’une personne chargée d’une mission de service public et de trafic d’influence actif sur une personne chargée d’une mission de service public, prévus à l’article 433- 1 du Code pénal, ainsi que les délits connexes de recel de favoritisme et de recel de prise illégale d’intérêts, prévus aux articles 321-1, 432-12 et 432-14 du Code pénal.

III. AMENDE D’INTERET PUBLIC

Aux termes de l’article 41-1-2 du Code de procédure pénale, le montant de l’amende d’intérêt public est fixé de manière proportionnée aux avantages tirés des manquements constatés, dans la limite de 30 % du chiffre d’affaires moyen annuel calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date du constat de ces manquements.

Le montant du chiffre d’affaires consolidé du groupe OMNIUM était de 37.518.535 Euros au cours de l’exercice 2020, de 45.991.575 Euros au cours de l’exercice 2021 et de 53.967.426 Euros au cours de l’exercice 2022, soit un chiffre d’affaires moyens annuel de 45.825.845 Euros.

Le montant maximal de l’amende d’intérêt public encourue est par conséquent de 13.747.753
Euros.

Les investigations et les pièces fournies par le groupe OMNIUM ont permis d’évaluer les avantages tirés des manquements à la somme d’1.000.000 Euros, somme qui correspond au profit généré par les marchés concernés.

A cette somme doit être ajoutée une part afflictive de l’amende tenant compte des facteurs suivants.

Au titre des facteurs majorants, il doit être relevé :

  • l’implication d’agents publics, et notamment de l’une des directrices de la SEMIVIM ;
  • le montant important des paiements réalisés au profit de l’agent corrompu et l’utilisation de plusieurs filiales du groupe OMNIUM pour y procéder ;
  • la mise en place d’une fausse facturation destinée à dissimuler les manquements et ayant permis la réalisation consécutive de faits de blanchiment.

Au titre des facteurs minorants, il sera retenu :

  • la coopération du groupe OMNIUM, qui a fourni au Procureur de la République les documents utiles dans le cadre de la procédure de convention judiciaire d’intérêt public ;
  • la reconnaissance non équivoque des faits par la société mise en cause ;
  • la mise en place, dès la révélation des faits, de mesures correctives et notamment d’obligations imposées par la loi SAPIN II alors même que le groupe OMNIUM n’y est pas astreint.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, le montant de la partie afflictive de l’amende s’élève, pour le groupe OMNIUM, à 700.000 Euros.

Par conséquent, le montant total de, l’amende d’intérêt public mise à la charge du groupe OMNIUM s’élève à 1.700.000 Euros, dont 765.000 Euros seront réglés par la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM.

IV. PROGRAMME DE MISE EN CONFIRMITE

Aux termes de l’article 41-1-2 du Code de procédure pénale, la convention judiciaire d’intérêt public peut imposer à la personne morale mise en cause l’obligation de se soumettre, pour une durée maximale de trois ans et sous le contrôle de l’Agence française anticorruption, à un programme de mise en conformité destiné à s’assurer de l’existence et de la mise en œuvre en son sein des mesures et procédures énumérées au II de l’article 131-39-2 du Code pénal.

Le groupe OMNIUM a transmis des informations et documents relatifs au dispositif de lutte contre la comiption qu’il a mis en place depuis mars 2022.

Sur la base de ces éléments et à la demande du Procureur de la République, l’Agence française anticorruption a transmis le 3 novembre 2023 un rapport d’examen préalable à l’établissement d’une convention judiciaire d’intérêt public. Elle préconise la mise en place d’un programme de mise en conformité d’une durée de trois ans qui porterait sur le dispositif anticorruption mis en place au sein de l’ensemble du groupe OMNIUM. Ce programme permettrait la réalisation par l’Agence française anticorruption, sur l’ensemble des activités et sociétés du groupe OMNIUM, d’abord d’un audit initial, destiné à dresser un état des lieux précis de l’existence et de la pertinence du dispositif anticorruption au sein du groupe, ensuite d’audits ciblés afin de s’assurer de son déploiement effectif sur l’ensemble du groupe et de son efficacité au regard des risques identifiés, et enfin d’un audit final destiné à apprécier si le groupe OMNIUM s’est doté d’un dispositif anticorruption complet, pertinent et efficace sur l’ensemble de ses sociétés.

Aux termes d’un courrier remis au Procureur de la République le 21 novembre 2023, le groupe OMNIUM a accepté, pour une durée de trois ans, de se soumettre avec ses filiales, au programme de mise en conformité envisagé et, dans ce cadre, aux audits et vérifications qui seront diligentés par l’Agence française anticorruption.

Les frais occasionnés par le recours par l’Agence française anticorruption à des experts ou à des personnes ou autorités qualifiées pour l’assister dans la réalisation d’analyses juridiques, financières, fiscales et comptables nécessaires à sa mission de contrôle seront supportés par le groupe OMNIUM jusqu’à concurrence de 300.000 Euros. Sur cette somme, 100.000 Euros seront versés par la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM.

L’Agence française anticorruption rendra compte au Procureur de la République, à sa demande et au moins annuellement, de la mise en œuvre du programme.

V. INDEMNISATION DES VICTIMES

Aux termes de l’article 41-1-2 du Code de procédure pénale, lorsque la victime est identifiée, et sauf si la personne morale mise en cause justifie de la réparation de son préjudice, la convention judiciaire d’intérêt public prévoit le montant et les modalités de la réparation des dommages causés par l’infraction dans un délai qui ne peut être supérieur à un an.

Dans le cadre du dossier de l’information judiciaire, la SEMIVIM, la Commune de Martigues et l’association ANTICOR se sont constituées parties civiles.

Par courriers du 6 septembre 2023, la SEMIVIM, la Commune de Martigues et l’association ANTICOR ont été informées par le Procureur de la République de la procédure de convention judiciaire d’intérêt public en cours et ont été invitées à faire valoir tout élément permettant d’établir la réalité et l’étendue de leurs préjudices.

L’association ANTICOR n’a pas répondu à ce courrier et n’a par conséquent pas fait connaître d’éléments permettant d’établir la réalité et l’étendue de son préjudice.

Par courrier du 26 octobre 2023, la SEMIVIM et la Commune de Martigues ont, par l’intermédiaire de leur conseil, fait connaître leurs prétentions. Au regard des éléments transmis, leur préjudice est évalué à 125.000 Euros pour la SEMIVIM et à 125.000 Euros pour la Commune de Martigues. Ces sommes seront donc mises à la charge du groupe OMNIUM.

Sur cette somme totale, 27.500 Euros seront versés par la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM à la SEMIVIM et 27.500 Euros seront versés par cette même société à la Commune de Martigues.

VI. MODALITE D’EXECUTION DE LA PRESENTE CONVENTION

Aux termes de la présente convention, la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM s’engage à procéder au paiement de 765.000 Euros au titre de l’amende d’intérêt public, et ce dans les conditions prévues par l’article R. 15-33-60-6 du Code de procédure pénale.

Ce paiement aura lieu en trois versements de 255.000 Euros, qui devront être effectués au plus tard aux échéances suivantes :

  • le 1er mars 2024 ;
  • le 1er juin 2024 ;
  • le 1er septembre 2024.

Le paiement des sommes prévues au titre de l’indemnisation des victimes sera effectué auprès de ces dernières ou de leur avocat dans le délai de 1 mois à compter de la date à laquelle la présente convention sera devenue définitive.

Il est rappelé que conformément aux dispositions des articles R. 15-33-60-6 et R. 15-33-60-8 du Code de procédure pénale, la SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM devra justifier au Procureur de la République de l’exécution de ces obligations dans les délais prescrits.

La SOCIETE D’ISOLATION ET DE PEINTURE OMNIUM s’engage par ailleurs à consigner par virement sur le compte du contrôleur budgétaire et comptable du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique la somme de 100.000 Euros dans un délai qui sera fixé par l’Agence française anticorruption.

A Marseille, le 29 novembre 2023

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