Code de conduite, cartographie des risques, sensibilisation des personnels… En matière d’anticorruption, la loi Sapin 2 impose aux entreprises assujetties un certain nombre d’obligations pour la mise en œuvre d’un dispositif de prévention efficace, et l’AFA (Agence Française Anticorruption) fournit régulièrement des recommandations pour l’améliorer.
À l’heure actuelle, ces obligations ne concernent que les entreprises de plus de 500 salariés et dont le chiffre d’affaires atteint 100 millions d’euros, soit moins de 2 000 entreprises françaises en tout (grandes sociétés de plus de 5 000 salariés et donc « grosses » ETI de plus de 500 personnes). Les petites ETI (entre 250 et 500 salariés ) et les PME n’ont pour leur part aucune obligation légale de les appliquer… Mais elles y ont tout intérêt. Nous restituons ici les principales recommandations émises par l’AFA dans le cadre de son projet de guide pratique anticorruption à destination des PME et petites ETI qu’elle a récemment soumis à consultation.
Même lorsqu’elle n’est pas soumise aux obligations Sapin 2, une PME ou ETI n’est pas à l’abri d’un scandale de corruption. Créer un dispositif anticorruption (DA), c’est d’abord mettre toutes les chances de son côté pour s’épargner une bataille judiciaire éprouvante. Mais au-delà de l’enjeu pénal, l’intérêt de se doter d’un DA est multiple :
La corruption « active » consiste à proposer ou consentir à verser un avantage à un agent public pour qu’il accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte dans le cadre de ses fonctions. De son côté, l’agent qui sollicite ou accepte un tel échange est coupable de « corruption passive ». Si la personne corrompue n’est pas un agent public mais un employé du secteur privé, on parle alors de « corruption privée ».
Dans le cas du trafic d’influence, l’avantage indu est proposé pour que l’agent abuse de son influence réelle ou supposée, afin d’obtenir une décision favorable (marchés, distinctions, emplois…) de la part d’une institution publique.
Le plus souvent, les affaires de corruption concernent l’un de ces deux chefs d’accusation. Les sanctions encourues pour une entreprise sont importantes : 5 millions d’€ d’amende ou le double du produit de l’infraction, mais aussi potentiellement la confiscation, l’interdiction d’exercer, la dissolution, l’exclusion des marchés publics… et pour les auteurs, la peine peut atteindre 10 ans d’emprisonnement et 1 million d’€ d’amende. Qui plus est, ces sanctions peuvent se cumuler à celles imposées par des autorités étrangères.
La concussion, le délit de favoritisme, la prise illégale d’intérêts et la soustraction ou le détournement de biens publics sont d’autres atteintes à la probité, mais elles ne peuvent être commises que par des agents publics. Néanmoins, tout individu ou entreprise peut être condamné pour complicité, recel ou blanchiment de chacune de ces infractions. Le guide cite l’exemple d’un dirigeant de PME condamné à un an d’emprisonnement, 20 000 euros d’amende et une interdiction de gérer une entreprise car il avait émis de fausses factures pour le compte d’un agent public, se rendant complice de corruption passive.
Pour limiter les risques que l’une de ces infractions se produise, les PME/ ETI ont tout intérêt à déployer des mesures anticorruption. Pour l’AFA, un DA efficace repose sur les mêmes leviers que pour les grandes entreprises :
Et, comme pour les grandes entreprises, ces mesures doivent être activement soutenues par le dirigeant — c’est même une condition sine qua non de leur efficacité selon l’AFA.
Seul le dirigeant a le pouvoir de conférer une véritable crédibilité à la démarche anticorruption de l’entreprise. Selon l’AFA, le dirigeant devrait :
Plus généralement, il doit mettre en œuvre toutes les dispositions du DA (listées ci-dessus) et veiller à ce que les potentielles filiales déploient aussi des mesures adaptées.
Dans les PME, le dirigeant est souvent chargé de l’aspect opérationnel de ces mesures. Mais il peut aussi les déléguer à un responsable anticorruption, à condition de vraiment lui donner les moyens d’exercer cette fonction : en communiquant efficacement avec cette personne, en informant tous les employés de la désignation de ce responsable anticor et en lui donnant les moyens de réaliser sa mission (formation, outils informatiques, assistance de conseillers extérieurs…).
Une bonne partie des dirigeants de PME françaises a compris l’importance d’une démarche anticorruption : en 2020, un diagnostic national mené par l’AFA a révélé que 50% des entreprises non assujetties à Sapin 2 avaient déjà mis en place un DA. Mais le diagnostic montre aussi que ces dispositifs sont souvent incomplets, et que les PME et ETI françaises accusent un véritable retard dans le déploiement du dispositif de prévention.
Dans un contexte où plus de 20% des entreprises françaises ont été confrontées à la corruption depuis 2015, les PME devraient tout faire pour réduire ce risque… Et les recommandations de l’AFA constituent un point de départ sérieux.
Documentation de l’Agence Française Anticorruption
Entreprises françaises & lutte anticorruption
La CJIP fait suite à un signalement Tracfin pour des faits survenus au Gabon dans…
Prévu en 2025, le procès de Lafarge, désormais filiale d'Holcim, sera sans précédent dans l'histoire.…
Anticor est devenue en 20 ans un acteur incontournable dans la lutte anticorruption en France…
Outre la parution du guide dédié aux fédérations sportives, l'AFA a diligenté un contrôle de…
Les lois anticorruption préventives touchent désormais à la sphère d'influence du Commonwealth Depuis une dizaine…
Ces faits de corruption sont intervenus en Libye (2006-2008) et à FujaÏrah aux E.A.U. (2011-2013)…