Le 7ème Forum mondial annuel sur la lutte contre la corruption et l’intégrité de l’OCDE s’est tenu à Paris le 20 mars dernier, l’occasion pour l’organisation de présenter le rapport intitulé « Resolving Foreign Bribery Cases with Non-Trial Resolutions ».
En exploitant les données issues de 27 pays sur les 44 signataires de la convention pour la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, le rapport fournit des statistiques intéressantes sur les mécanismes employés par les états pour élucider et sanctionner des faits de corruption transnationaux. Nous en présentons ici les principaux points marquants.
Depuis l’entrée en vigueur de la convention de l’OCDE le 15 février 1999, 890 affaires liées à des problèmes de corruption transnationale dans les pays étudiés ont été traitées avec succès. Parmi celles-ci, 695 se sont conclues via un règlement hors procès, soit 78%.
En résumé, les instruments permettant le règlement des affaires hors procès, sont devenus le principal moyen pour faire respecter les lois contre la corruption transnationale pour les 44 pays signataires de cette convention.
2008 fut l’année qui a vu le premier règlement hors procès impliquant deux juridictions différentes, celle des États-Unis et celles de l’Allemagne, pour des faits de corruption perpétrés par Siemens AG. Depuis, cette pratique s’est développée pour résoudre un certain nombre de cas liés à des infractions économiques sérieuses liant plusieurs pays, comme la corruption d’agents publics étrangers.
Cette tendance devrait même s’accentuer dans les années à venir pour trois raisons : les pays coopèrent de plus en plus en amont, c’est à dire au stade de l’enquête, ils créent ou renforcent leurs lois anticorruption et enfin accordent la priorité aux poursuites pour corruption transnationale.
Le rapport détaille par ailleurs que cette coordination étroite entre juridictions, pour des infractions économiques graves touchant plusieurs pays, n’est pas possible, ou a minima extrêmement complexe, pour les affaires impliquant un procès. C’est précisément une des raisons pour lesquelles le règlement hors procès est désormais systématiquement favorisé. En effet, il donne aux autorités nationales compétentes, une forme de quasi-certitude quant à l’issue de la procédure et au montant de la transaction financière négociée entre les parties prenantes.
La possibilité d’une réduction de peine est évidemment un facteur incitatif majeur pour les entreprises faisant l’objet d’une enquête pour faits de corruption. Cependant, il faut savoir qu’il existe des différences flagrantes entre les pays au niveau des sanctions imposées. Elles sont liées aux lois en vigueur dans chaque pays ainsi qu’à la façon dont les procédures de règlement hors procès sont gérées.
Certains pays (loi française Sapin 2 par exemple) prévoient une peine maximale qui peut être imposée dans le cadre d’une Convention Judiciaire d’Intérêt Public (« CJIP »ou « DPA » en anglais pour « Deferred Prosecution Agreement »). Dans d’autres, les lois ou directives garantissent un pourcentage de réduction par rapport à la sanction qui aurait été appliquée si le procès avait eu lieu et que l’entreprise avait été jugée coupable.
Pour illustrer cela, le rapport donne deux exemples extrêmes : en décembre 2016, les sociétés Odebrecht et Braskem ont accepté de verser plus de $3 milliards dans le cadre d’un règlement coordonné entre les juridictions du Brésil, de la Suisse et des Etats-Unis. A l’autre bout de l’échelle, dans l’affaire suisse dite « Banknotes Case », une société a été condamnée à une amende de 1 Franc Suisse alors que le montant total du pot-de-vin versé était supérieur à 24 millions de Francs Suisses.
En conclusion, 20 ans après l’entrée en vigueur de la convention, ce rapport montre que le défi de la lutte contre la corruption transnationale reste entier. Il met également en avant le principe que les règlements hors procès sont devenus des outils clés pour lutter contre les infractions économiques graves. Pour ce qui est des entreprises, elles y trouvent donc 2 avantages majeurs : les moyens de réduire le montant des amendes à payer et la capacité à éviter des conséquences encore plus graves, comme l’exclusion ou l’inéligibilité à des contrats, l’interdiction d’exercer localement ou pire encore, le dépôt de bilan.
Lire aussi : La corruption coûte chaque année 1 000 milliards de dollars en recettes fiscales à l’échelle mondiale selon le FMI
La CJIP fait suite à un signalement Tracfin pour des faits survenus au Gabon dans…
Prévu en 2025, le procès de Lafarge, désormais filiale d'Holcim, sera sans précédent dans l'histoire.…
Anticor est devenue en 20 ans un acteur incontournable dans la lutte anticorruption en France…
Outre la parution du guide dédié aux fédérations sportives, l'AFA a diligenté un contrôle de…
Les lois anticorruption préventives touchent désormais à la sphère d'influence du Commonwealth Depuis une dizaine…
Ces faits de corruption sont intervenus en Libye (2006-2008) et à FujaÏrah aux E.A.U. (2011-2013)…
View Comments