C’est une affaire déjà ancienne mais toujours édifiante. Elle illustre parfaitement la nécessité de prendre en compte l’extraterritorialité des lois anti-corruption lorsqu’une entreprise déploie son dispositif de conformité.
En 2011, la SEC (Securities and Exchange Commission), gendarme de la bourse américaine, et le DoJ (Department of Justice) ont infligé une amende de plus de 90 millions de dollars au leader des services de télécommunications en Hongrie, la société Magyar Telekom, et à trois de ses anciens dirigeants. Ils ont été accusés d’avoir violé le FCPA (Foreign Corrupt Practices Act) américain en soudoyant des représentants du gouvernement et des partis politiques en Macédoine et au Monténégro. Leurs objectifs étaient double: obtenir des contrats et empêcher la concurrence dans le secteur des télécommunications.
Les faits de corruption identifiés dans cette affaire ne concernaient a priori que des marchés en Macédoine et au Monténégro. L’affaire n’avait donc aucun lien apparent avec le territoire américain. Pourtant, Magyar Telekom et ces trois anciens dirigeants ont été visés par une enquête de la justice américaine.
Comment cela a-t-il été rendu possible ? L’un des protagonistes avait tout simplement évoqué des actes de corruption dans un email ayant transité par des serveurs hébergés aux États-Unis.
En effet, grâce à cet email qui a permis d’établir un lien avec le territoire américain dans le cadre d’une relation commerciale entre états tiers, une cour de justice New-Yorkaise a estimé que la SEC était parfaitement habilitée à poursuivre Magyar Telekom et les trois anciens dirigeants pour violation de la loi FCPA. Autrement dit, un email comportant des éléments à charge, envoyé et reçu en dehors des États-Unis mais qui a transité via un serveur situé sur le sol américain, place de facto l’entreprise, ses dirigeants et ses salariés sous le coup de la législation américaine.
Cela démontre de nouveau l’importance, notamment pour les sociétés exposées à l’international, de mettre en place des programmes de conformité irréprochables vis-à-vis des lois comme le FCPA aux États-Unis, le UK Bribery Act au Royaume-Unis ou encore la loi Sapin 2 en France, en particulier du fait de leur portée extraterritoriale. Dans le cas contraire et au moindre écart, faute d’une approche robuste et sérieuse du sujet, les compagnies s’exposent à des poursuites et des sanctions lourdes, quels que soit les pays où elles opèrent.
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