Grant Thornton a publié en décembre 2018 les résultats de son étude réalisée auprès de 3 000 décideurs (grands groupes et leurs filiales, ETI, PME) 18 mois après l’entrée en vigueur de la loi anti-corruption française. Rappelons pour commencer quelques chiffres marquants :
– seules 6% des entreprises interrogées ont d’ores-et-déjà pleinement rempli leurs obligations pour se mettre en accord avec la loi.
– le niveau moyen d’avancement atteint par les autres entreprises est estimé à 57% de l’objectif, avec une hétérogénéité globale dans le traitement des 8 thématiques majeures de la loi.
– plus de la moitié des entreprises étudiées ont déjà détecté des cas de corruption, alors que 60% déclarent pourtant n’avoir pas finalisé une cartographie des risques satisfaisante au regard de la loi.
– 15% seulement sont conformes concernant leur dispositif d’évaluation des tiers.
En analysant plus finement les réponses et tendances qui se dégagent, il apparaît que le code de conduite, le régime de sanction et le dispositif d’alerte sont des mesures qui n’impliquent pas de changement majeur concernant l’organisation centralisée. Par conséquent, ces dispositifs sont les plus simples à déployer et donc les plus avancés à date.
A l’opposé, les contrôles comptables, les procédures d’évaluation des tiers, la formation et le dispositif de surveillance se révèlent les critères qui ont pris le plus de retard. Plusieurs facteurs expliquent cela selon les auteurs, avec des thèmes plus complexes qui nécessitent une approche globale en rupture avec l’existant : ils exigent des changements d’organisation, des façons de faire différentes, et l’appropriation de nouveaux outils. Le top-management doit alors créer un véritable élan, de sorte de susciter l’adhésion de l’ensemble des collaborateurs sur le plan opérationnel.
Parmi les facteurs externes favorisant un déploiement rapide dans l’entreprise, il est intéressant de noter le rôle d’accélérateur joué par le UKBA britannique (United Kingdom Bribery Act), assez comparable à la loi française, et à un degré moindre par le FCPA américain (Foreign Corrupt Practices Act), sur les entreprises déjà soumises à l’une ou l’autre de ces réglementations au moment de l’entrée en vigueur de Sapin 2. En revanche, le secteur d’activité d’une entreprise et sa taille ne sont manifestement pas des éléments décisifs dans la mise en place des dispositifs de conformité.
Les entreprises françaises dans leur ensemble, semblent donc ne pas avoir encore perçu, ou alors tardivement, le niveau de contrainte, la sévérité et la portée de la loi. A la lumière des ces chiffres, des menaces préoccupantes pèsent aujourd’hui sur elles au regard des lourdes sanctions que pourrait prendre l’AFA (Agence Française Anticorruption) en charge de promouvoir, contrôler et faire appliquer les dispositifs anti-corruption, et des autres risques encourus.
La plupart des entreprises considère l’évaluation des tiers comme le volet du dispositif le plus compliqué à implémenter de par sa lourdeur et sa complexité. A peine 15% des entreprises se déclarent donc en conformité à ce jour. La définition même de la notion de tiers peut-être bloquante et uniquement 12 % des entreprises ont prévu de traiter tous leurs tiers ainsi que le recommande l’AFA.
Les autres réduisent le périmètre du dispositif, soit en le limitant à certaines catégories de tiers (le plus souvent les fournisseurs), soit en déterminant un seuil (montant total des transactions avec un tiers) à partir duquel déclencher le processus d’évaluation.
Lire aussi : Relations fournisseurs : quels sont les risques sur les données de l’entreprise ?
Grant Thornton – 2ème baromètre des dispositifs anticorruption
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